RÉSEAUX (1)

Sur Facebook, je m’amuse à parcourir ces pages où des femmes se plaignent des manipulateurs qui ont gâché leur vie. Elles croient dur comme fer à la théorie du pervers narcissique, ou pour aller plus vite du “pn”, catégorie fourre-tout où se retrouve, fatalement, l’homme qui les a trahies et abandonnées (en général pour une fille plus jeune). Celle-ci, aujourd’hui, s’indigne que son ex se lève tôt le matin (alors qu’avec elle il était impossible de le sortir du lit). Ou même qu’il veuille travailler, lui qui ne foutait rien. Elle sait tout cela, manifestement, grâce aux posts qu’il publie, et où elle voit d’odieux stratagèmes pour continuer de la faire souffrir. Une commère compatit, reconnaît dans ces traits ceux du pervers honni.

Une autre (ou la même) se distingue du tout-venant, en reprochant à son ex de préférer les femmes plus âgées. Une seconde internaute surenchérit. Elle n’a pas honte, celle-là, de ramener un jeune devant ses enfants ? C’est un chaudron inépuisable, où le ressentiment n’en finit pas de recuire. Des émissions sont postées en boucle, où des femmes éplorées, assises sur leur lit, racontent comment leur prince charmant est devenu un monstre. Elles reviennent sur le fait qu’il a essayé de leur faire croire qu’elles étaient coupables. C’est lui, le Mal. Aimait-il se faire prendre en photo ? C’est la preuve que c’était un pn. Le mien aussi était comme cela. N’aimait-il pas se faire prendre en photo ? C’est la preuve que c’était un pn. Ils préfèrent ne pas laisser de traces, agir dans l’ombre.

Parfois, une voix s’élève, pour oser contester qu’un type qui quitte sa compagne fasse forcément partie de l’engeance maudite. On la balaie. Il ne saurait être question de céder un pouce de terrain. Une passionaria des réseaux sociaux rend hommage à ces merveilleuses guerrières que sont selon elle les femmes. Une autre décrit les hommes comme une classe, contre laquelle il faudrait lutter (on est passé à un étage au-dessus, celui du discours militant). Drôle de guerre, drôle de lutte des classes, qui font ma joie et ma terreur.




Pas de commentaire

Poster un commentaire